Analyses sur le PLU, le COS et la loi SRU
Analyses sur le PLU, le COS et la loi SRU
Depuis le début du XXème siècle, le droit de l’urbanisme se développe pour permettre la mise en œuvre d’un projet territorial coordonné à un niveau intercommunal pertinent.
En décembre 2000, la loi SRU introduit le projet d’aménagement et de développement durable (PADD) comme document de base des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des schémas de cohérence territoriale (SCOT). Mais cette logique de planification à deux niveaux n’a que rarement été mise en œuvre ; le plus souvent et très majoritairement en Région Ile-de-France, les maires ont reporté sine die l’élaboration des SCOT pour utiliser le PLU comme outil de gestion du foncier. Il en résulte que les PLU sont fréquemment modifiés pour permettre la réalisation de projets immobiliers, qui n’avaient pas été envisagés. Ils sont modifiés mais pas toujours dans l’esprit des PLU initiaux.
Pour Paris, par exemple, les modifications du PLU ont été approuvées en 2016, sans pour autant procéder à une révision du document initial dans sa globalité. Le plan prévoit ainsi que dans les quartiers déficitaires en logement social, 30 % de toute nouvelle construction dédiée au logement de plus de 800 m2, leur soit consacré. Ces 30 % seront dédiés au logement intermédiaire dans les quartiers mieux dotés en social.
Le projet Bercy-Charenton est un exemple qui apporte un démenti à l’objectif du PLU modifié, en ce qui concerne les 30 % de logements intermédiaires, dans un quartier déjà fortement pourvus en logements sociaux. Cela étant on voit mal l’utilité de cette règlementation dans une ville comme Paris où il n’y a plus de foncier disponible !
Le logement est devenu une variable d’ajustement de la carte électorale avec des préemptions massives. De plus on recherche les espaces pour bétonner, et pour ce faire, on grignote ce qui pourrait être des espaces de respiration. On développe du logement social, partout où cela est possible, avec 240 nouvelles réserves sur Paris. Le dernier exemple à Paris est le projet de la Place Mazas qui bétonne un trottoir !
Pour éviter la création de ghettos ou de zone à trop fortes densités une solution peut consister à limiter à 30 % le nombre de logements sociaux ou apparentés par zone administrative IRIS.
Jusqu’à présent, le PLU pouvait fixer, grâce au coefficient d’occupation du sol (COS), la surface de plancher susceptible d’être construite sur un terrain. La mise en œuvre de ce COS dans les documents d’urbanisme a fait l’objet de critiques, notamment en raison du fait que ce mécanisme était susceptible de freiner la densification et de contribuer à l’étalement urbain. Le COS est donc abandonné au profit d’autres règles, telles que l’emprise au sol, la hauteur maximum des bâtiments ou encore l’implantation de constructions par rapport aux limites séparatives, ou au domaine public.
Il n’est donc plus possible de fixer un coefficient d’occupation des sols (COS) dans le PLU. Ce qui rend impossible les « sur COS » (basés sur le COS) fixés par le règlement du PLU pour l’application des surdensités accordées notamment aux constructions qui satisfont à des critères de performance énergétique (majoration de 30 % du COS). Cela met également un terme au mécanisme de transfert de droit à construire dans une zone dont le COS ne le permettait pas. Enfin, le calcul du versement (taxe) pour sous-densité (non-utilisation de la totalité des droits à construire) est également impacté par cette suppression de COS. Cependant, ce type de dispositif existe toujours (sans se fonder sur le COS) par le biais d’autres règles (relatives au gabarit, à la hauteur, à l’emprise au sol…) que le PLU fixe déjà.
En conséquence, la limitation de l’étalement urbain est un objectif partiellement atteint par la loi. Ainsi, depuis le 24 mars 2014, le COS n’est plus opposable aux demandes de permis de construire et de déclarations préalables. Les instructeurs des permis de construire ne doivent plus tenir compte de cette valeur. Par contre l’abandon du COS permet dès aujourd’hui d’augmenter la surface habitable de nombreuses unités foncières en autorisant l’élévation des bâtiments puisque le coefficient d’emprise au sol (CES) reste en vigueur. Le moyen le plus courant de gagner de la surface habitable reste la construction d’étages supplémentaires ou, dans certaines conditions, de diviser son terrain…
Cette suppression va permettre de densifier dans la volumétrie existantes les immeubles existants qui étaient surdensitaires (c’est-à-dire dépassant le COS de fait).
Elle porte atteinte aux objectifs du PLU de Paris, entre autres, à savoir la préservation du logement et des constructions affectées au service public ou d’intérêt collectif à des (CINASPIC), puisque notamment la diminution de ces surfaces ne sera plus contrôlée par le COS de fait. La réglementation sur l’usage permettra de préserver le logement. Il n’en sera pas de même en ce qui concerne les CINASPIC. Par ailleurs, dans le cas d’opération en COS de droit, dans le secteur de protection de l’habitation, les dispositions permettant la construction de logements au profit de bureaux n’existent plus.
La conséquence directe c’est de pouvoir multiplier par 3 ou 4 (selon les zones) la superficie construite sur un même terrain. Par exemple, quand un pavillon de 100 m2 de plein pied se vendra, l’acquéreur pourra monter 2 étages et atteindre 300 m2 qu’elle que soit la surface de son terrain ! Nos villes changent de physionomie.
Il faut des limites obligatoires dans les PLU pour éviter les excès en la matière.
La législation actuelle a des conséquences sur tout le territoire, et en particulier la loi SRU :
En achetant de l'immobilier neuf, nous payons grâce à la loi SRU un impôt déguisé, correspondant à la perte que le promoteur a fait sur les logements sociaux du même programme !
En effet la loi SRU contient une disposition, l’obligation, pour les communes de plus de 3 500 habitants, de compter 25% de logements sociaux dans leur parc de logement.
La loi prévoit que toute opération de plus de 10 logements, ou plus de 2 000 m² de SHON, comporte 25 % de logements sociaux, que le promoteur doit revendre à un bailleur social. Le promoteur reporte la perte engendrée sur le prix des logements vendus au secteur social sur les acheteurs de logements privés. Autrement dit, quand vous achetez un logement neuf dans une opération comportant du logement social (soit quasiment toutes les opérations un peu importantes aujourd’hui), vous payez, sans qu’on vous le dise expressément, une soulte, correspondant à la perte que votre promoteur a fait sur les logements sociaux du même programme.
Si les maires des communes acceptent de nouvelles constructions privées, ils dégradent leurs quota SRU et augmente leurs amendes. Si un maire veut passer de 5 % à 25 %, il faudrait que sur sa commune ne se construisent que des logements sociaux pendant 10 ans, vu le rythme de construction généralement constaté. Seulement, comme le logement social est le plus souvent financé par un surcoût sur les logements privés, c’est difficile faute de financements publics à hauteur des ambitions du maire.
Si un maire veut rattraper son retard, il faut qu’à tout nouveau lotisseur, il impose non pas 25 % de logements, sociaux, mais 35 ou 40 %. Mais aucun lotisseur ne voudra imputer sur 6 logements le déficit lié à la vente à perte de 4 logements sociaux à des organismes de logement social. Et donc les lotisseurs iront construire dans les communes qui ont déjà beaucoup de logements sociaux.
On ne saurait mieux dire que la loi SRU signe l’arrêt du développement des communes de plus de 3500 habitants, trop petites pour avoir été par le passé un pôle de développement du logement social. Le seul choix rationnel est de continuer à payer l’amende, de prier pour que ses contribuables ne se révoltent pas, et de tenter de se rattraper en pratiquant comme un forcené la chasse à la subvention !
Dans la plupart des grandes agglomérations attractives, certains organismes sociaux avaient pour habitude de financer de nouveaux logements sociaux en revendant de vieux logements, pour minimiser le recours aux subventions. Le problème est qu’un logement revendu devient privé… donc hors quota SRU. La loi SRU rend donc plus compliqué le financement de la construction de nouveaux logements sociaux, alors qu’elle était censée le favoriser !
Comme nous l’avons vu, les promoteurs doivent construire entre 25 et 30 % de logements sociaux par opération. Un logement social est couramment revendu avec une perte de 400 à 600€/m2 aux bailleurs sociaux, donc les acheteurs privés surpaient leur logement neuf de 200 à 300€ du m2. Naturellement, cette taxe cachée, dans tous les sens du terme, est payée par un accroissement de la dette supportée par l’acheteur. Ce dispositif conduit à construire, au total, moins de logements, privés et sociaux, que si la construction était libre.
Parmi les acquéreurs des logements sociaux on trouve certes des organismes publics de logement HLM. Mais aussi des « Sociétés anonymes d’HLM », dont les actionnaires de référence sont en général des grandes banques ou autres « institutionnels », avec souvent la participation d’entités semi-publiques comme des SEM, la caisse des dépôts et autres « exceptions françaises ».
Ces SA HLM sont exonérées de taxe foncière (pendant 25 ans), de taxe CET (qui se subdivise en CAVA et CFE, ces acronymes barbares désignant les taxes ayant remplacé la taxe professionnelle), et même d’impôts sur les sociétés. Ces sociétés paient une TVA à 5,5 % sur leur investissement, mais récupèrent leur TVA à 19,6 % sur leurs achats. Quand on regarde le résultat net de certaines SA de HLM on constate que ces sociétés se portent très bien, par rapport aux organismes HLM.
La loi SRU est à revoir au profit d’une véritable loi de promotion de la construction en France, avec un rééquilibrage financier en faveur des organismes publics de logement HLM.
Pascal Desmeaux.
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